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03 septembre 2020
La Premier ministre a dévoilé le contenu du plan de relance dédié à la transition écologique : 11 Md€ pour les transports, 9 Md€ pour l'industrie-énergie, 7,5 Md€ pour le bâtiment-logement et 1,2 Md€ pour l'agriculture. Des dépenses engagées sur deux ans.
© Gouvernement
« C'est un pas de géant pour la transition écologique en France. Par son ambition, par sa cohérence et par sa solidité, il nous fait basculer dans l'économie de demain, décarbonée et économe en ressources », a assuré Barbara Pompili à l'occasion de la présentation ce jeudi 3 septembre du plan de relance(1) du Gouvernement. Quelques minutes avant, le Premier ministre avait rappelé l' « ambition et l'ampleur historique » de ce plan destiné à faire face à la plus forte dépression économique, depuis la crise de 1929, survenue à la suite de la pandémie de Covid-19.
Doté de 100 milliards d'euros, le plan baptisé « France relance » est financé à 40 % par l'Union européenne. Le volet dédié à la transition écologique représente 30 Md€ et vise les secteurs du transport, du bâtiment, de l'énergie-industrie, et de l'agriculture. Si plusieurs think tank saluent la bonne orientation donnée par ce plan en matière de climat, plusieurs associations pointent en revanche des financements incompatibles avec la transition écologique.
Soutien au secteur ferroviaire
Onze milliards d'euros (Md€) sont consacrés aux transports. Concernant le ferroviaire, l'exécutif annonce 4,7 Md€, notamment pour désenclaver le territoire avec deux expérimentations pilotes menées dans le Centre-Val-de-Loire et le Grand-Est. Deux milliards vont être consacrés en soutien à la recherche pour la mise au point d'avions électrique ou fonctionnant à l'hydrogène, conformément au plan présenté en juin dernier. Le même montant est consacré à la conversion du parc automobile vers des véhicules moins polluants avec l'objectif de faire bénéficier un million de véhicules de ce soutien en deux ans. Celui-ci sera toutefois moins élevé que l'aide exceptionnelle post-confinement qui a bénéficié aux acquéreurs de 200 000 véhicules. Cent millions d'euros vont par ailleurs être consacrés à l'installation de bornes électriques, avec un objectif de 100 000 bornes d'ici fin 2021, et à la création de voies réservées au covoiturage.
Les transports collectifs vont bénéficier de 700 millions d'euros (M€) en Ile-de-France principalement pour les projets liés aux Jeux-Olympiques et aux RER, et 200 M€ en régions pour le développement de métros, tramways et bus en sites propres. Le Gouvernement annonce un budget multiplié par trois pour le vélo avec 200 M€ pour sécuriser le stationnement, renforcer les pistes cyclables ou créer des passerelles au-dessus des voies de circulation.
Enfin, 175 M€ seront consacrés au secteur fluvial pour accélérer la rénovation des canaux et 200 M€ aux ports maritimes pour les projets d'électrification à quai.
Aide à la densification
Le Gouvernement annonce une enveloppe de 7,5 Md€ dédiée au bâtiment et au logement avec un objectif transversal d'économie d'énergie et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Sur cette enveloppe, 4 Md€ vont être consacrés à la rénovation thermique des bâtiments publics (écoles, universités, hôpitaux, commissariats, tribunaux, etc.), 2 Md€ à celle des bâtiments privés à travers l'extension du dispositif MaPrimeRénov aux copropriétés et aux propriétaires bailleurs, 500 M€ aux logements sociaux et 200 M€ aux TPE-PME.
Un autre volet est consacré à la relance de la « construction durable » avec 350 M€ d'aide aux collectivités délivrant des permis de construire permettant d'optimiser le foncier, c'est-à-dire de densifier les agglomérations, et 300 M€ pour financer un fonds dédié au recyclage des friches. Ce fonds doit permettre de subventionner les projets qui utilisent des sites déjà artificialisés pour construire.
L'hydrogène et le nucléaire plébiscités
Le volet industrie-énergie du plan prévoit 9 Md€ pour l'accompagnement des entreprises dans la transition énergétique. Sur ce soutien, 2 Md€ sont dédiés à la filière de l'hydrogène vert, le Premier ministre souhaitant lui consacrer 7 Md€ d'ici 2030 afin de faire de la France un « pays de pointe » en la matière. Le plan consacre également 1,2 Md€ pour aider les industries à décarboner leur production.
Deux cents millions d'euros sont prévus en soutien à la filière nucléaire au titre du plan, auxquels s'ajouteront un soutien du programme d'investissements d'avenir (PIA) et un co-investissement d'EDF et de l'État. Ce qui représentera au total 470 M€ pour la filière. Cinquante millions d'euros sont consacrés au renforcement de la résilience des réseaux électriques : reconstruction de réseaux, résorption de fils nus, construction de petits parcs de batteries, enfouissement du réseau de distribution, amélioration de la résistance mécanique des lignes aériennes.
En matière d'économie circulaire, le plan prévoit 226 M€ pour accompagner la réduction de l'utilisation du plastique, favoriser l'incorporation de plastique recyclé et accélérer le développement du réemploi. Une enveloppe de 274 M€ est par ailleurs prévue pour moderniser les centres de tri, de recyclage et de valorisation des déchets. Dans les deux cas, ce financement est opéré par un abondement du fonds « Économie circulaire » de l'Ademe.
Une stratégie sur les protéines végétales
L'exécutif prévoit d'accorder 1,2 Md€ au secteur agricole. Dans cette enveloppe, il est prévu 400 M€ pour accélérer la transition agro-écologique, 250 M€ pour la modernisation de la filière animale, la sécurité sanitaire et le bien-être animal, mais aussi 100 M€ pour mettre en œuvre une stratégie nationale sur les protéines végétales, 250 M€ pour la modernisation des équipements agricoles et 200 M€ pour aider la forêt à s'adapter aux changements climatiques.
Le plan consacre aussi 250 M€ pour la biodiversité dans les territoires : 135 M€ pour la restauration écologique, 60 M€ pour les aires protégées, 40 M€ pour la protection du littoral et 15 M€ pour le renforcement des barrages. Une ligne de 50 M€ est dédiée au renforcement parasismique des bâtiments aux Antilles. Enfin, 300 M€ sont consacrés aux réseaux d'eau et à la modernisation des stations d'épuration.
Le plan est « une inflexion bienvenue vers la transition bas-carbone », salue le Haut Conseil pour le climat. « L'évaluation de son impact carbone est un progrès notable. L'enjeu réside désormais dans la mise en œuvre et le suivi », ajoute l'instance consultative qui avait pointé les insuffisances du Gouvernement en juillet dernier. De même, plusieurs think tanks saluent le plan. "C'est un bon départ pour le climat : les dépenses prévues dans le plan de relance pour la rénovation énergétique des bâtiments, la mobilité bas carbone et la production d'énergie sont conformes aux besoins de financement public supplémentaire qui avaient été identifiés par I4CE", salue Benoît Leguet, directeur de ce think-tank.
Les associations sont en revanche plus sceptiques. Le Réseau Action Climat (RAC) pointe ainsi « l'ambigüité de l'engagement du Gouvernement dans la transition écologique ». Pour les associations membres, les investissements annoncés sont bridés par la limitation à deux ans des aides pour la transition, la poursuite de financements incompatibles avec la transition (nucléaire, infrastructures routières, agriculture de précision, hydrogène non renouvelable, 5G), le sous-calibrage de certaines lignes budgétaires (rénovation des logements privés) et l'absence de conditionnalité écologique et sociale des aides accordées aux entreprises.
« La balle est dans le camp des parlementaires pour augmenter l'ambition et la cohérence du plan de relance et rendre le budget global de la France pour 2021 plus vert et juste », ajoute le RAC. La plupart de ces mesures doivent en effet être traduites dans le projet de loi de finances que Bercy doit présenter à la fin du mois de septembre.
Laurent Radisson
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-36030-plan-relance.pdf