Un grand rassemblement est programmé le 22 février prochain, devant la centrale de Fessenheim,
entre 15 et 18 heures, dont les promoteurs sont l’association
« Fessenheim notre énergie » soutenue par les administrations locale et
territoriale, les Écologistes pour le Nucléaire (AEPN), l'association
"Voix du nucléaire", WONUC (World Council of Nuclear Workers) et un collectif de vétérans du programme nucléaire français réalisé durant les années 70 à 90.
Tous espèrent être rejoints par des représentants de structures
associatives et syndicales dont le moins qu’on puisse dire est que la
résistance déployée contre un gâchis délibérément planifié n’a pas
convaincu.
Ce jour ô combien sinistre de la chute réputée définitive des barres de Fessenheim 1, il sera symboliquement important que cecollectif
de vétérans clame haut et fort la réprobation qu’inspire à de nombreux
compatriotes la deuxième forfaiture d’État ayant consisté à attenter par
contrat électoral à l’intégrité de l’inestimable outil industriel dont
ces vétérans dotèrent non sans mal le pays et dont ils demeurent fiers.
Ces serviteurs de la Nation n’espèrent que l’élémentaire
reconnaissance de ses enfants, consistant à accorder une attention toute
particulière à ce que veut révéler d’alarmant la protestation du 22
février, au moment où est assénée aux Français la deuxième augmentation
du prix de l’électricité – certainement pas la dernière ! – en moins
d’un an. Le pays doit en effet savoir que le responsable de ce funeste
tropisme tarifaire n’est autre que la sacrosainte loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) prévoyant rien moins qu’aggraver la facture en continuant de s’en prendre à l’intégrité du parc électronucléaire.
Il revient donc aux personnalités du pays les plus en vue et/ou
notoirement les plus connues, pour leurs compétences et pour leurs
prises de positions sur la politique énergétique nationale, de donner
une puissante résonance sociale à pareille iniquité et, par conséquent, à
amplifier sensiblement le discours des protestataires du 22 février
2020.
« Une rançon électorale à 10 milliards d’euros mettant de surcroît à mal la stabilité du système électrique »
C’est ce que l’on devrait pouvoir lire, le 22 février prochain, à Fessenheim. Explications :
Il est loisible à quiconque de vérifier que la récente dérive du
léonin processus ARENH tend à conférer une responsabilité primordiale
croissante aux kWh nucléaires, dans la sécurisation de
l’approvisionnement électrique du pays, rendant proprement surréaliste
la décision de fermer la doyenne de nos centrales.Tout plaide,
en effet, contre le sacrifice de cet outil de production largement
amorti, donc prodigue des kWh les meilleurs marchés, que de surcroît
l’ASN a déclarée sûr pour au moins une décennie encore.
Dans ces conditions, comment ne pas qualifier de tribut électoral un
sabordage industriel aussi délibéré et que la communauté nationale va
devoir chèrement payer, contre vents et marées protestataires ? En voici
le chiffrage dans lequel n’entre pourtant pas le dédommagement qu’EDF
va devoir consentir à des partenaires allemands et suisses ayant
aujourd’hui un droit de tirage sur la production des deux tranches, à
hauteur de 17 % pour les premiers, de 15 % pour les seconds :
En partant du constat que la valeur d’amortissement comptable est
nulle à Fessenheim – quand, selon la cour des comptes, elle est en
moyenne de 4 € par MWh pour le reste du parc – et du constat que le MWh
sort à 29,6 € de cette usine (à mettre en regard du montant d’un impôt CSPE de 10,5 €/MWh et de celui d’un impôt « CSPE » allemand de 39,5 €/MWh !),
pour produire les 12 TWh que l’arrêt définitif de la centrale va
soustraire du réseau, la collectivité nationale va devoir dépenser au moins 1 milliard d’euros supplémentaires, chaque année, si l’on se réfère à l’abandon d’une possible exploitation jusqu’à 50 ans, et près de 2 milliards d’euros annuels,si
l’on se réfère à l’abandon de l’exploitation jusqu’à 60 ans qu’a
obtenue la centrale de référence, Beaver Valley aux USA, soit, au total, une ardoise d’au moins 10 milliards d’euros à la charge nette du consommateur.
Cette estimation, dont le détail est à disposition de quiconque en
ferait la demande, repose sur l’hypothèse que les 12 TWh annuels
seraient produits pour moitié par des éoliennes maritimes et terrestres,
au coût moyen de 150 euros/MWh (220 pour l’off-shore et 80 pour le
terrestre), et, pour moitié, par de l’électricité provenant de centrales
à cycle combiné au gaz, soit 110 euros/MWh (avec un coût du carbone de
50 €/t). Ainsi, le coût moyen de l’électricité de
remplacement promet-il d’être de 130 euros par MWh, soulignant un
différentiel d’environ 100 euros par MWh, avec la situation actuelle.
Chers compatriotes, méditez bien ces chiffres ! Car, si vous êtes
généralement peu nombreux à chercher à comprendre les mécanismes des
conditions financière et matérielle que vous fait le pouvoir et les
intentions qui en sont à l’origine, des troubles sociaux de plus en plus
fréquents montrent qu’une part grandissante d’entre vous n'hésite pas à
tout casser, lorsqu’elle juge ces conditions insupportables. Dès lors,
dites-vous bien qu’il est le plus souvent trop tard pour les réformer en
profondeur et dans les délais exigés.
André Pellen, porte-parole du collectif des vétérans du programme
nucléaire français des années 70 à 90 et président du Collectif pour le
Contrôle des Risques Radioactifs (CCRR) à Toulon