Pourquoi la biodiversité (même invisible) renforce-t-elle la résistance aux maladies ?


SCIENCES Dans une publication récente des chercheurs toulousains montrent que la biodiversité est un rempart naturel contre les nouvelles maladies

Hélène Ménal

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Les chercheurs se sont notamment intéressés à une maladie causée par des champignons qui décime les batraciens. Illustration. — Paignton Zoo - Cover - Sipa

  • Des chercheurs toulousains démontrent que la biodiversité permet de lutter naturellement contre les maladies nouvelles.
  • En particulier grâce au microbiome, ces communautés de virus ou bactéries qu’on retrouve à la surface de la peau, chez l’homme comme chez les animaux.
  • Malheureusement, ce bouclier naturel est particulièrement sensible à la pollution et aux changements climatiques.

Une autre raison, s’il en fallait une, de prendre soin de la planète dans le monde post-Covid. Des chercheurs de  l’Ecole nationale supérieure agronomique de Toulouse (INP-ENSAT)* viennent de publier les résultats d'une étude portant sur l’expression des maladies. Elle conclut, en prenant l’exemple des amphibiens, que la biodiversité renforce l’immunité. Y compris la biodiversité invisible à l’œil nu.

Car l’originalité du travail de ces scientifiques est d’introduire un nouveau paramètre : le microbiome. « Il s’agit de la communauté microbienne composée de bactéries, de virus et champignons, que l’on retrouve dans notre tube digestif mais aussi, pour l’homme comme chez les animaux, à la surface, sur la peau », détaille Adeline Loyau, co-auteure de l’étude.

Une bande de micro-organismes comme premier rempart

« Ces micro-organismes, qui vivent et s’organisent ensemble, constituent notre première ligne de défense, le premier rempart contre les pathogènes », ajoute Dirk Schmeller, titulaire de la chaire Axa Ecologie fonctionnelle des montagnes à l’INP Toulouse.

Pour appuyer leur démonstration, les chercheurs ont pris l’exemple d’un champignon meurtrier qui décime notamment les grenouilles en Amérique, en endommageant leur peau puis en provoquant chez elles des crises cardiaques. « Les amphibiens, bien plus que d’autres espèces emblématiques, sont les vertébrés les plus menacés de la planète », souligne Adeline Loyau. Or, plus leur microbiome est diversifié, plus leurs habitats sont complexes, plus ils résistent à ce champignon, et plus leur taux de mortalité est bas. Notamment pour certain grâce à une bactérie fongicide présente dans leur microbiome bien gluant et qui les immunise.

Des risques d’apparition de nouvelles maladies

La mauvaise nouvelle, c’est que le microbiome est sensible à la pollution et au changement de climat. Car une bactérie est facile à perturber, sous l’effet par exemple d’une fluctuation de température. Et tout le Meccano du bouclier naturel s’écroule. « Le changement climatique et la perte de biodiversité sont des facteurs de stress pour les écosystèmes, prévient Dirk Schmeller. C’est vrai pour l’homme, pour les animaux et pour le microbiome. Nos recherches montrent que si les différents axes de la pyramide des maladies sont déstabilisés, de nouvelles maladies infectieuses peuvent apparaître, avec les risques que cela représente pour l’homme. » Et dont tout le monde est bien conscient maintenant.

* Du Laboratoire Ecologie Fonctionnelle et Environnement (CNRS-UPS-Toulouse-INP)