Dans cette analyse long format, l'ONF tord le cou aux idées
reçues et rétablit quelques vérités sur les coupes en forêt. Gestion
durable, préservation des sols, stabilité des récoltes de bois,
diversité des essences... Des informations à découvrir de toute urgence !
En forêt publique, une gestion raisonnée de la ressource en bois
Au-delà du paradoxe étonnant vécu
par une partie de la population qui aime l’idée du bois, mais si
possible, sans avoir à passer par la phase "récolte" (voir l’éditorial du moniteur de l’été 2019
"ce bois qui nous fait scier"), la préoccupation majeure du
consommact’eur est d’être informé et rassuré sur la réalité d’une
gestion raisonnée des forêts.
En France, la forêt recouvre 31% du territoire métropolitain. Gestionnaire des forêts publiques, l’ONF gère 11 millions d’hectares de forêts
(domaniales appartenant à l’Etat ou forêts des collectivités), sur les
25 millions d’hectares de forêts métropolitaines et d’Outre-mer. Sur
quels enjeux et quels critères s’appuie son action ? Fontainebleau, Tronçais, Grande Chartreuse, Sainte Baume…
Si chaque forêt a ses particularités et ses problématiques locales, les
forestiers suivent tous une feuille de route commune : garantir la
préservation et le renouvellement des milieux naturels en conciliant
enjeu économique, environnemental et sociétal. Produire du bois, agir
pour l’environnement et favoriser l’accueil de tous les publics en forêt
: tel est le socle de la gestion durable pratiquée par l’ONF depuis
plus de cinquante ans. Une gestion très encadrée par la loi, certifiée
et reconnue par le label PEFC dans 100% des forêts domaniales.
"La forêt française est surexploitée",
"couper du bois, c'est détruire la forêt", "une forêt non-gérée est une
forêt en bonne santé"… Peut-être avez-vous entendu près de chez vous ou
dans les médias ces affirmations ? Afin de répondre à ces idées reçues,
voici quelques chiffres et éléments de réponse.
Une surface forestière et un stock de bois en croissance
La forêt française constitue la quatrième plus grande superficie forestière d'Europe. Sa surface a doublé en 200 ans et d’après les chiffres de l’IGN,
elle continue de croître naturellement à un rythme de 85.000 hectares
par an depuis 1985, ce qui représente un peu plus de l’équivalent de la
superficie de Paris et des départements de la petite couronne. Une
vigilance toutefois dans les territoires péri-urbains et rétro-littoraux
où les forêts sont sous pression de l’urbanisation, impliquant ainsi
une protection foncière renforcée.
Cette croissance des forêts françaises
est une bonne nouvelle pour la forêt et les écosystèmes, même si de
récentes inquiétudes apparaissent en raison de l’accélération du
changement climatique et des épisodes répétés de sécheresse
fragilisant aujourd’hui considérablement certains peuplements
forestiers (rougissement des sapins et des hêtres, épidémie de scolytes
sur les épicéas, etc). "Nos équipes sont pleinement mobilisées sur
ces crises. Il est indispensable de mener une gestion adaptative des
forêts pour assurer leur avenir et leur permettre de continuer à jouer
leurs rôles essentiels pour l’Homme et la Planète", déclarait récemment François Bonnet, directeur général adjoint de l’ONF.
Le saviez-vous ?
Si la forêt a doublé de surface en 200 ans, c’est notamment parce
que la France l'a favorisée en menant de grandes opérations de
plantation au XIXe siècle pour assainir et valoriser les zones
marécageuses landaises, pour stabiliser les dunes littorales ou pour
lutter contre l'érosion des sols et les glissements de terrain en zone
de montagne grâce à la politique de restauration des terrains de montagne. L'exode rural et la déprise agricole ont aussi contribué à son expansion.
Des récoltes stables garantes du renouvellement des forêts
Depuis 1966, date de création de l'ONF, le volume moyen de bois prélevé en forêt domaniale s'élève à 5,7 millions de m3 par an. En 2019, ce chiffre est de 5,5 millions de m3,
soit un niveau de prélèvement en baisse depuis 1995 ! Par ailleurs, les
études de l’IGN démontrent aujourd’hui que les stocks de bois sur pied
augmentent de 0,8 m3 par hectare et par an en forêt domaniale, et de 1,5 m3
en forêt des collectivités. Que les Français se rassurent, l’ONF est
loin de mener une politique intensive d’exploitation des forêts
publiques.
Le dernier rapport du GIEC l'affirme
: une gestion durable et une utilisation du bois rendue possible par la
coupe des arbres constitue une des réponses à la lutte contre le
changement climatique. "Lorsque le carbone du bois est transféré
dans les produits ligneux récoltés, ceux-ci peuvent stocker du carbone
sur le long terme, et être substitués à d'autres matériaux plus
énergivores", précise le Groupement d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec).
L’exploitation durable et raisonnable des forêts, comme la
pratiquent les forestiers de l’ONF, est un puissant levier de transition
écologique pour agir concrètement en faveur d’un développement durable
soucieux d’un juste équilibre entre les besoins de l’Homme et la Nature.
François Bonnet,
directeur général adjoint de l’ONF
Des coupes de bois encadrées
A l’ONF, cette gestion durable préconisée par les scientifiques du GIEC est définie et encadrée par une feuille de route : "l’aménagement forestier".
Coupes d’arbres, travaux d’entretien de la forêt, remise en état des
milieux, protection des sols, renouvellement de la forêt par
régénération naturelle ou par plantation, protection environnementale,
accueil des usagers : chaque forêt publique dispose d’un programme
d’action sur 20 ans et de réglementations strictes à respecter.
Les forestiers n’agissent pas seuls,
mais en véritables partenaires d’une politique territoriale : tout plan
de gestion forestier est ainsi approuvé par arrêté ministériel en forêt
domaniale et par arrêté préfectoral en forêt communale, après de larges
consultations et concertations.
Les forestiers le savent :
protéger l’intégrité physique et biologique des sols, c’est préserver la
croissance des arbres et la vitalité des forêts. En effet, la porosité
des sols forestiers permet la circulation de l’eau et de l’air sous
terre, indispensable au développement des racines. Autre enjeu majeur,
les sols sont un immense réservoir de carbone et de biodiversité. Eviter
leur tassement est donc un enjeu majeur.
A la question : pourquoi de
grosses machines roulent en forêt lors des travaux d’abattage ? Didier
Pischedda, expert national exploitation forestière et logistique, répond
: "les équipements que nous utilisons sont adaptés aux sols
sensibles. Un engin forestier de plusieurs tonnes équipé de chenilles
élargies génère une pression au sol réduite". D'autres techniques sont également favorisées. "Nous essayons de développer, notamment aux côtés de la FNEDT,
le débardage par câble pour limiter les impacts terrestres des travaux
et réduire l’empreinte carbone liée aux transports. C’est aussi le sens
de notre engagement pour le déploiement des ballons dirigeables aux
côtés de la société Flying Whales", poursuit Didier Pischedda.
Découvrir d'autres méthodes d'exploitation forestière :
Chênes, hêtres, châtaigniers,
pins, épicéas, sapins : telles sont les sept familles principales
d’arbres en France. Si chaque forêt dispose d’une essence emblématique,
favorisée par les forestiers, la diversité des peuplements est
essentielle. "Les forêts publiques ne sont pas des champs de palmiers, il n’y a pas de monoculture à l’ONF", témoigne Régine Touffait de la direction forêts et risques naturels à l’ONF.
Lorsque les promeneurs déambulent au milieu de majestueuses forêts de
chênes, ils aperçoivent d’autres arbres en "sous-étage", comme des
hêtres ou des charmes par exemple. Le développement de ces derniers est
volontairement favorisé pour apporter aux plus beaux peuplements le bon
dosage de la lumière, mais aussi pour enrichir la diversité écologique
des milieux. La résilience des forêts face au dérèglement climatique
passera par plus de diversité.
Autre élément : à l’ONF, les
forestiers privilégient la régénération naturelle des forêts, à hauteur
de 80%. Autrement dit, ils laissent faire la nature et la germination
naturelle des graines apportées par le vent et certains animaux
"disperseurs". Le travail des hommes vient ensuite, en accompagnement de
cette dynamique. Avec la coupe, le forestier ne fait que reproduire une
stratégie de reproduction développée par la nature. C’est l’arrivée de
la lumière au sol et l’enlèvement des arbres adultes qui accaparent les
nutriments qui permettront aux semis de se développer. Avec le
changement climatique cependant, les plantations, qui représentent
aujourd’hui 20 % de la régénération des forêts, devraient être de plus
en plus nombreuses. L’objectif : privilégier des essences résistantes
aux évolutions à venir et renforcer la diversité génétique des
peuplements. "Les dépérissements liés aux effets de la sécheresse de cet été et aux crises sanitaires nous poussent à accentuer notre action en ce sens", explique-t-on à l’ONF.
Aujourd’hui, une forêt durablement gérée
est une forêt mieux armée pour lutter contre le réchauffement
climatique qui ne fait que s’accentuer. A l’inverse, une forêt
vieillissante et non entretenue est plus vulnérable aux perturbations.
Plus que jamais, l’action de l’ONF se situe à la croisée des défis du
XXIe siècle. Les forêts publiques françaises et le savoir-
faire évolutif des forestiers constituent un atout incontournable pour
contribuer au nécessaire développement durable de notre société.
Scier du bois : bon pour l’Homme et la Planète !
En France, les coupes d’arbres effectuées dans les forêts publiques
font partie du cycle de vie de la forêt. S'il est vrai que celle-ci n'a
pas toujours besoin de l'Homme pour pousser, les forestiers de l’ONF
garantissent néanmoins une préservation de l’équilibre global des
écosystèmes. Comment ? En intervenant à différents moments clé de la vie
des peuplements pour favoriser leur épanouissement, et en les
protégeant aussi des attaques sanitaires et de la surpopulation des
gibiers qui, en consommant les jeunes pousses, entravent le
renouvellement des forêts. Là aussi, tout est question d’équilibre.