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Un patient, atteint du Covid-19, en réanimation à l'hopital Bichat de Paris le 13 mars 2020 Photo - AFP/Archives - Anne CHAON
Comme on le
voit en Italie ou dans les régions françaises les plus infectées par
l'épidémies de coronavirus, les capacités hospitalières en lits de la
réanimation sont au coeur de la crise sanitaire. Comment fonctionnent
ces services, quel personnel y est requis, quelles sont les capacités
mobilisables en France ? Le Pr Jean-Claude Manelli, qui a dirigé la
réanimation de La Conception à l'AP-HM, fait le point.
Les
réanimations sont des structures comportant en général 8 à 16 lits
destinés à prendre en charge des patients atteints de défaillances des
grandes fonctions vitales : respiratoire, cardio-vasculaire, rénale,
hépatique... et comportant les moyens d'y suppléer. Ces défaillances
peuvent être consécutives à des situations très différentes :
interventions chirurgicales lourdes telles que les transplantations
d'organes, polytraumatismes notamment par accidents de la route,
infections sévères bactériennes ou virales, maladies cardiaques aigues
comme les infarctus du myocarde compliqués, accidents vasculaires
cérébraux... Certaines réanimations dites polyvalentes prennent en
charge toutes les pathologies, d'autres sont plus spécialisées dans
certaines spécialités (chirurgicale, médicale, respiratoire, brûlés).
Les
réanimations, où la présence d'un médecin spécialiste doit être
continue 24/24h, doivent répondre à des normes strictes en terme de
personnel : les infirmières (qui doivent avoir une formation préalable
d'adaptation à l'emploi) et les aide-soignantes sont fonction du nombre
de malades et placés sous l'autorité d'un cadre de santé spécialisé. En
terme d'équipement les matériels (notamment appareils de monitorage pour
la surveillance permanente de toutes les fonctions vitales,
respirateurs permettant d'assurer la ventilation artificielle, systèmes
régulés de perfusion intra-veineuse) doivent également permettre la
prise en charge de tous les patients.
L'ouverture
d'une Réanimation dans un établissement hospitalier est soumise à
l'agrément des Agences Régionales de Santé qui planifie leur
implantation sur son territoire. Leur nombre pour la France est
d'environ 5000. Un nombre approximatif car le manque de personnel
soignant conduit souvent à fermer des lits, voire à fermer des unités
entières.
Le séjour en réanimation est
variable selon la pathologie initiale et le nombre de fonctions vitales
atteintes, mais globalement supérieur à la durée de séjour en
hospitalisation courante, ce qui ne permet pas toujours, surtout en cas
de circonstances exceptionnelles, d'hospitaliser sur place des patients
justiciables d'une réanimation. Ces patients doivent alors être
transférés dans d'autres hôpitaux parfois assez éloignées.
Afin
de faire face à cette situation, réglementairement, chaque réanimation
doit être adossée à une Unité de Surveillance Continue d'un nombre de
lits équivalent dont l'objectif est :
- de
surveiller des patients qui ne sont pas vraiment justiciables d'une
hospitalisation en Réanimation, mais qui sont susceptibles de
décompenser une fonction vitale à court terme
- de délester les lits de réanimation en permettant la sortie anticipée de quelques heures voire de quelques jours dans cette structure, mieux équipée en moyens de surveillance humains et matériels qu'un service d'hospitalisation traditionnel.
- de délester les lits de réanimation en permettant la sortie anticipée de quelques heures voire de quelques jours dans cette structure, mieux équipée en moyens de surveillance humains et matériels qu'un service d'hospitalisation traditionnel.
Un troisième type de structures
coexiste à la réanimation et à la Surveillance Continue : les Soins
Intensifs. Ces unités ont pour fonction de prendre en charge des
patients atteints ou susceptibles d'être atteints à court terme de la
défaillance d'une fonction vitale bien précise. L'exemple le plus
répandu est la cardiologie, mais d'autres spécialités comme la
néphrologie ou l'hépato-gastro-entérologie peuvent exister. En situation
de crise, des solutions dégradées peuvent permettre la prise en charge
de malades supplémentaires : en terme de locaux, les Surveillances
Continues, voire les Salles de Réveil des blocs opératoires peuvent être
réaménagées pour être utilisées comme Unités de Réanimation. En terme
de personnel, les médecins anesthésistes-réanimateurs et les infirmières
anesthésistes (IADE), libérés du bloc opératoire par le report des
interventions non urgentes, ainsi que les infirmières ayant une
expérience en Réanimation, complètent les équipes existantes. Enfin en
terme de matériel, les moniteurs de surveillance et les respirateurs des
blocs opératoires ainsi que ceux des Unités de Surveillance Continue
sont utilisables.
On peut estimer que ces
mesures permettraient de doubler la capacité de lits de Réanimation en
France. Une fois passée la situation de crise actuelle, le nécessaire
retour d'expérience permettra probablement d'affiner ou de revoir les
modalités d'exercice de la Réanimation en temps normal ou en situation
de crise.